Activites Administratives, Politiques et Sociales

Thierno Aliou fut d'abord Chef du District de Labé de 1901 à 1912. En 1913 il et nomme Chef de la province de

Donghora.

Si Thierno Aliou a été admirable dans le domaine judiciaire, il ne montra les mêmes dispositions dans le domaine

administratif. Ce fin lettré, plus enclin aux choses de I ‘esprit qu'aux choses matérielles n'apporte qu'un soin mitigé

aux recouvrements de l'impôt et aux multiples détails de l’administration indigène. Il n’a manifesté que peu d'aptitude

pour ces fonctions. Elles lui sont maintenue toutefois jusqu'en 1916 car elles I ‘obligent à rester en contact immédiat

avec le poste et permettent aux français d’exercer sur lui une action continue.

Sur le plan politique or social, si Thierno Aliou jouissait de l'estime du roi Alpha Ibrahima et de son fils Alpha Yaya de

la branche Soriya, par contre il avait de la jalousie du parti adverse c'est-à-dire de famille Alphaya. Malgré tout ces

derniers ne réussirent pas à lui porter ombrage.

Alpha Yaya a été arrêté par le gouvernement français en novembre 1905. Son important territoire fut reparti en trois

(3) parties dont le Labé proprement dit qui fut donne Alpha Alimou comme chef et représentant du roi destitué auprès I

‘administration française.

Les relations d’Alpha Alimou avec Thierno Aliou Bhoubha N’ Diyan furent bonnes pendant les premières années. Par l

a suite, les marabouts du chef lui prédirent que tôt ou tard Thierno Aliou sera Chef du Labé. AIfa Alimou voulut

contrecarrer cette prédiction. Or il n'est pas possible de lutter contre les décrets de Dieu.

Thierno Mamadou, père de Thierno Aliou, lui-même marabout avait déclaré aux siens que son fils ne mourra pas

sans être Chef de Labé et que nul ne pourra faire échouer sa prédiction qui est un secret de Dieu. Ceci embrouilla l

es relations entre les deux grands personnages (Alpha Alimou chef administratif et Thierno Aliou chef religieux)

notamment à partir de 1909.               

Au mois d’octobre de cette année Alpha Alimou qui fut l’objet de nombreuses dénonciations aux autorités du cercle

surtout pour trafics de captifs et exactions fut arrête emprisonne. II ne fut pas remplacé. Avec lui prit fin le grand

commandement coutumier dans le Labé.

De ce fait Thierno Aliou devint sur place le personnage le plus influent non seulement sur le plan religieux mais aussi

ceux politique et social. Ce qui lui attira aussitôt des ennemis jaloux de lui qui cherchèrent à le nuire.

On savait par ailleurs qu’Alpha Yaya, destitue en 1905 et envoyé en exil au Dahomey via Dakar et Gorée pour une

durée de 5 ans était un grand ami de Thierno Aliou. La durée de I ‘exil avant expire le 29 novembre 1910, Alpha

Yaya regagna Conakry le 30 dudit mois. Thierno Aliou crut, comme tous les Khaldouyanke et leurs partisans, a la

prochaine restauration du chef du grand Labé. Il en désira sincèrement et en parla avec sympathie. Mais prudent et

réservé, il fit une campagne beaucoup moins apparente, attira peu d'attention sur lui et finalement échappa aux

mesures rigoureuses qui s'abattirent sur Thierno Aliou WaIiyyu de Gornba (Kindia) et sur Karamoko Sankoun de

Touba (Gaoual).

Dans la guerre qui éclata à Gomba en 1911 tous les marabouts du Fouta-Djallon dont Thierno Aliou Bhoubha

N'Diyan et Alpha Yaya lui-même présent à Conakry furent suspectes d'en faire partie. Les craintes de Thierno Aliou

furent très vives et il formula même le projet de quitter le Fout pour aller s'installer d'abord dans le N'Gabou (Guinée-

Bissau) puis dans l'Asseri (Kédougou) selon Paul Marty.

Des politiciens avides de places auprès de I ‘administration coloniale ainsi que d'autres ennemis de Thierno Aliou

(voire des parents de Manda) ne tardèrent pas à diffamer gravement ce dernier, directement au Gouverneur Camille

Guy. Ces dénonciations étaient si graves que le Gouverner ordonnait aux administrateurs de Labé plusieurs fois de

procéder à L’arrestation de Thierno Aliou Bhoubha N’Diyan, Heureusement que celui-ci a qui Dieu a évité des

déboires bénéficia d'une ferme protection de la part des diffèrent commandants de cercle, administrateurs Gauthier

(1910-1911), Fouchet (1911-1912) et Kersaint Gilly (1912-1913); et ce contrairement à d'autres de leurs collègues,

tel que celui de Kaade, Luirette, qui avait arrêté maigre lui les marabouts de Touba sur simple ordre du Gouverneur

contre-proposition de sa part.

L'administrateur Gauthier écrivit au Gouverneur que: "l'administrateur n’est pas seulement un élément devant

exécuter ordres qu’il reçoit,  mais le représentant qui doit avoir la haute vision pour les affaires de son cercle".

Et comme tel, tant qu'il ne demande rien, que le Gouverneur sache que la situation politique est bonne. En tout cas,

précisait Gauthier, “mettre la main sur Thierno Aliou Bhoubha N'Diyan serait bouleverser la vie du pays et une

révolte générale serait même à craindre". II mettait aussi le Gouverneur en garde contre toute dénonciation

tendancieuse qu'il recevait directement à Conakry. De ce fait tout projet d’arrestation de Thierno Aliou fut

définitivement abandonne.

En 1912 I ‘administrateur Kersaint Gilly l’un des protecteurs de Thierno Aliou Bhoubha N'Diyan procéda à une

réorganisation administrative du cercle en le divisant en 22 provinces. II confia à Thierno Aliou le commandement de

Labé ville et des villages environnants. Ce dernier voulut repousser I ‘offre qui lui était faite prétextant qu'il voulait

rester chef religieux sans assumer une responsabilité administrative, Mais on le conseilla de ne pas décliner I ‘offre.

II exerça donc sans zèle ces fonctions jusqu'en 1916. Les autorités sentirent alors une certaine négligence de la part

de Thierno Aliou qui n'était pas de nature à obliger les gens de par sa bonté de cœur. Or, face à l'effort de guerre et

autres fournitures, obligatoires qui accablaient les masses, il fallait un tout autre homme comme chef de la province.

C'est ainsi qu'il fut déclaré à sa grande satisfaction, inapte à gouverner et déchargé de ses fonctions

administratives.

 

El Hadj Karamoko Ciradiou Balde